Portrait littéraire/artistique #10 : Amélie Dubois

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∗Accompagné d’un jeu littéraire de Cadavre Exquis (variante)∗ 

AMÉLIE DUBOIS 

« Sensibilité et liberté » 

Originaire de Montréal, Amélie Dubois a travaillé près de 15 ans en tant qu’artiste en effets visuels au sein de différents studios d’animation pour le cinéma et la télévision. Depuis 2015, elle se consacre à l’illustration pour l’édition jeunesse et participe à de multiples rencontres avec les enfants lors de salons ou d’animations scolaires. Amélie a publié ses albums chez plusieurs éditeurs québécois, notamment chez Isatis, 400 coups et les éditions de la Bagnole. Je vous invite à découvrir son

Portrait littéraire et pas que…

Le(s) mot(s) qui vous définit (définissent) le mieux…

On dit de mes illustrations qu’elles dégagent de la douceur alors j’imagine que cela doit forcément révéler une partie de ma personnalité. Mais je crois que les mots qui me définiraient le mieux sont sensible et liberté.

Dessiner pour vous c’est…

Une passion avant tout ! C’est la meilleure façon que je connaisse pour m’exprimer.

Vos influences artistiques…

Il y en a tellement ! Comme j’ai travaillé plusieurs années en cinéma et en animation, mes influences proviennent surtout de ces deux domaines. J’étais fascinée et je le suis encore par les artistes conceptuels. Quand j’étais petite, mon père avait dans sa librairie le grand livre de The Art of Disney et je me souviens l’avoir regardé très souvent et d’avoir copié les dessins (j’avais un faible pour les 7 nains ! ) J’ai toujours de loin préféré admirer des croquis et des dessins en cours de création que le dessin en version finale !

Vous puisez votre inspiration…

Tellement de choses ! La nature sans aucun doute. Je passe beaucoup de temps dehors à marcher. J’ai aussi remarqué avec les années que mon travail est aussi teinté par le changement des saisons. Que je travaille sur un projet en été ou en hiver, le résultat ne sera pas le même. J’écoute aussi beaucoup de musique (j’achète encore des Cds !)

Vous illustrez pour les enfants parce que…

Parce que le monde des enfants n’est pas encore très loin du mien. Les rencontrer dans les écoles ou dans les salons du livre est de loin une partie de mon travail que je préfère. Et si je suis invitée lors d’un souper entre amis et que des enfants sont présents, il y a de fortes chances que je me retrouve à la même table qu’eux !

Le meilleur moment pour dessiner ou créer…

Le soir ! En fait, dès que le soleil se couche j’ai soudainement plein d’énergie ! J’ai toujours été comme ça. Je dis souvent à la blague que j’aime moins l’été que les autres saisons car le soleil se couche beaucoup trop tard ! ;)

Votre plus beau souvenir en tant qu’illustratrice…

Mon plus beau souvenir serait lorsqu’on m’a proposé mon premier projet pour l’album jeunesse La peine de Sophie-Fourire aux éditions les 400 coups. Je n’y croyais simplement pas ! Ça été aussi une superbe rencontre avec l’auteure Nadine Poirier qui habite la même région que moi, celle de Trois-Rivières. Et bien-sûr, la journée où j’ai reçu la boîte avec les exemplaires et que j’ai peu enfin tenir le livre entre mes mains !

Vos couleurs préférées sont…

J’adore le bleu indigo ! J’ai aussi un petit faible pour la couleur Gris de Payne. Je dis Gris de Payne peut-être parce que nous sommes en automne et que la couleur du ciel y ressemble drôlement ! Si nous étions en été, je dirais sans doute un bleu de Prusse ☺

Votre lecture-refuge…

Je dirais que la lecture pour moi agit en soit comme un refuge. J’aime lire des histoires que rejoignent ce que je vis dans le moment. Le plus difficile dans mon quotidien de travailleuse autonome est de résister à l’appel de mon vieux divan baignant dans la lumière du soleil et qui me dit : « Allez, viens t’étendre un instant lire un peu, tu continueras ce que tu fais plus tard ! »

Votre rêve le plus extravagant…

Pour l’instant, j’habite un petit appartement et je travaille de chez moi alors c’est un peu comme si j’habitais mon atelier. La pièce qui servirait normalement de salon est l’endroit où j’ai installé mon endroit pour travailler. Alors en ce moment, je rêverais d’habiter une jolie petite maison entourée d’arbres et avoir mon atelier dans une grande pièce au 2e étage et y travailler, le soir bien entendu! C’est assez précis, vous trouvez ?..

Un petit mot pour vos lecteurs/lectrices…

N’hésitez pas à m’écrire ! J’aime toujours vous lire. Je fais ce métier entre autre pour rejoindre les gens alors cela me fait toujours plaisir de lire ce que les gens apprécient à travers mes dessins. Vous pouvez aussi me suivre sur les réseaux sociaux sur Facebook et Instagram. J’ai aussi une boutique en ligne sur ETSY (Amelie Dubois Art) où il est possible de se procurer des reproductions de mes illustrations d’inspiration personnelle ☺

Merci beaucoup, Amélie,  pour vos réponses en tous points passionnantes et bonne continuation dans tous vos projets artistiques !

Pour voir la galerie d’illustrations et le site Internet d’Amélie Dubois, cliquez sur l’image au début de l’article ! 

L’illustration tirée de l’album Rien du tout ! aux éditions Isatis (2016)

Et en bonus, un jeu du cadavre exquis pour tous les participants de la série de portraits littéraires/artistiques. Voici la contribution d’Amélie Dubois (en vert).

Le cadavre exquis

« Le soleil brillait sur le paysage  vallonné, caressait les vignes de ses rayons et fixait de son œil jaune la scène du crime.

— Se peut-il que ce cadavre soit exquis ? murmura le soleil.

— Il se peut, lui répondit un petit oiseau perché sur le corps frêle, celui-là l’est assurément.

Et le bec replongea au cœur de l’abdomen frétillant d’insectes et de fruits mûrs. Des grappes de raisins et des amas de figues noires recouvraient le délicieux petit cadavre. 

L’oiseau picora la cage thoracique. En becquetant un pépin de figue, il perça le cœur du cadavre. Un filet de vapeur s’en échappa en chuintant, faisant fuir le volatile à tire d’ailes. C’est ainsi que l’âme s’échappa du corps. Elle s’étira, tournoya, profitant de l’air si doux de cette fin de matinée. Elle aurait volontiers batifolé entre les vignes, voletant de-ci, de-là. Mais elle se re-condensa avec soin. L’heure n’était pas à l’éparpillement. Car d’autres allaient bientôt mourir à leur tour. 

De toute façon, l’âme n’était pas du matin. L’âme n’aimait pas, vraiment pas, qu’on la dérange. Cette âme-là n’était pas une bonne âme. Elle détestait la bonne humeur. Elle pouvait à tout moment filer sous la vapeur. Elle attendit que passe la cavalerie des étourneaux, que le soleil reprenne sa place, bien haut, sur l’écume des nuages, pour rejoindre la départementale 249. 

En planant au-dessus de la route, l’âme en rencontra une autre, une qui venait de quitter un corps à peine tiédi ayant en plein cœur une tache rouge coquelicot, ou rouge brasier ou rouge baiser.

Telles de parfaites ondes magnétiques, les deux âmes réunies se réchauffèrent, elles allaient avoir l’éternité pour faire connaissance…

Et c’est pile à ce moment-là que le vent se mit à souffler, souffler… et sépara méchamment les âmes réunies. Il ne resta au sol que l’âme volatile, de fort mauvaise humeur, songeant qu’elle était mal barrée. Il lui fallait sans tarder trouver une autre demeure si elle ne voulait pas à son tour être emportée dans les airs. C’est alors qu’elle avisa, sur le bord de la route, un jeune garçon en short, et qu’elle fondit sur lui. 

Le garçon fut traversé d’un tremblement furtif, électrique, puis une douce chaleur l’enveloppa. Il resta de longues minutes silencieux, scrutant l’horizon agité de nuages sombres. Le soleil n’apparaissait plus que par petites touches scintillantes, tel un tableau impressionniste. Le jeune garçon serrait dans sa main gauche une petite améthyste qu’il ne quittait jamais en souvenir de sa mère. Il respira profondément et murmura « allons-y ! »

L’améthyste serrée dans son poing, il traversa la départementale déserte à cette heure et alla s’agenouiller près du corps de la femme à la tache rouge baiser, rouge coquelicot ou rouge brasier. Ce corps sans âme était encore tiède. Le jeune garçon leva la tête vers le ciel soudain orageux. Un éclair cingla l’air brûlant. « C’est le moment ! » songea l’enfant. Au loin résonna la sirène d’une voiture de gendarmerie. Il ne disposait plus de beaucoup de temps. Alors d’un geste précis, l’enfant enfonça l’améthyste dans le cœur mort de la femme. Au même moment, un brutal coup de tonnerre déchira l’air électrique. Et les yeux de la morte s’ouvrirent. 

Affolé, le petit garçon prit les jambes à son coup. Il n’oubliera pourtant jamais cet instant. Les yeux bien ouverts du cadavre plongeant son regard dans le sien.La femme cadavre était, elle, allongée de tout son long sur l’asphalte chaude. La plaie qui à peine quelques minutes avant était ouverte et sanglante se refermait délicatement sur son abdomen sans laisser aucune cicatrice. Elle se sentait vivante mais ne pouvait s’identifier lorsque les secours entreprirent de lui demander son prénom. Qui était-elle? » 

**Une petite précision concernant le jeu : il s’agit d’une version modifiée du cadavre exquis. L’incipit d’Anne Loyer laissant présager le genre policier, les participants doivent prendre conscience des contributions précédentes. 

Les dernières parutions d’Amélie Dubois :

    


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